lundi 17 septembre 2012

0 Le socialisme - Tocqueville

Le Socialisme est le principe d’un régime social dans lequel l’individu serait considéré comme un rouage irresponsable de la société, à laquelle reviendrait immédiatement la charge de tirer profit de ses moyens et de fournir à ses besoins. C’est un retour à l’esclavage, non plus à la charge d’un maître, mais à celle de l’État.

On conçoit dès lors aisément combien cette perspective répugne aux favorisés de la fortune, et combien elle semble pourtant préférable pour les prolétaires au régime créé par l’individualisme, qui ne leur laisse en réalité guère plus de liberté, mais ne leur fournit par contre aucune sécurité. Il leur semble que l’État sera un bon maître parce qu’eux-mêmes en seront les maîtres, et que la suppression des existences oisives et de tout parasitisme diminuera de beaucoup la somme moyenne de travail à répartir sur tous les citoyens valides.

Ce n’est pas par cet idéal, si difficile à réaliser qu’il soit, que le socialisme prête à la critique, mais par la condition pour l’atteindre qu’il exige préalablement : à savoir la destruction de toute organisation sociale préexistante. Nation, corporation, famille société quelconque en un mot, rien de tout cela ne peut se prêter à une individualisation telle qu’on l’exige pour reconstruire sur ce sable l’édifice socialiste.

Or il faudrait, pour briser tous ces moules naturels ou historiques et pour couler le nouveau, la tyrannie d’une aristocratie souverainement puissante, – la multitude étant incapable d’une telle suite dans les idées, comme le prouvent les divisions profondes des partis socialistes. Il faudrait ainsi ce dont le socialiste a le plus horreur, puisqu’il a la passion de l’égalité.

Il n’est pourtant pas impossible que par cette voie il se réalise quelque chose d’approchant. Le règne de l’individualisme engendre, en effet, celui du capitalisme, c’est-à-dire, dans le commerce et l’industrie, l’évincement des éléments patronaux par une ploutocratie de plus en plus oligarchique, qui tend fatalement à s’emparer de la richesse privée et par celle-ci des pouvoirs publics. Le développement des grandes compagnies anonymes financières ou industrielles est un acheminement frappant au socialisme d’État, car l’État ne saurait s’en désintéresser : il faut qu’il les achète ou qu’il soit acheté par elles, comme cela se passe par le moyen des : emprunts d’État. – La dette publique, c’est la confiscation de la fortune privée. – L’avenir serait ainsi au socialisme, non par le fait de ses fauteurs qui seraient incapables de l’organiser, mais par l’aveuglement des classes soi-disant conservatrices qui se sont confiées au libéralisme.

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