Article paru en 1999 dans le numéro Hors-série de L'Action Française 2000 consacré au centenaire du mouvement d'Action française sous le titre Fédéralisme maurrassien contre fédéralisme européen.
La doctrine d’Action française se trouve aujourd’hui confrontée à un nouveau défi : convaincre les souverainistes, hantés par les menaces de dislocation que la politique européenne de régionalisation forcée fait peser sur la nation, que le projet de décentralisation ne saurait avoir d’autre but, pour les maurrassiens, que de renforcer le sentiment national en l’enracinant dans une appartenance concrète. Le présent article se propose de contribuer à relever ce défi par quelques réflexions qu’il sera sans doute nécessaire d’approfondir et de compléter dans un grand débat avec nos partenaires “nationaux-républicains”.
La doctrine d’Action française se trouve aujourd’hui confrontée à un nouveau défi : convaincre les souverainistes, hantés par les menaces de dislocation que la politique européenne de régionalisation forcée fait peser sur la nation, que le projet de décentralisation ne saurait avoir d’autre but, pour les maurrassiens, que de renforcer le sentiment national en l’enracinant dans une appartenance concrète. Le présent article se propose de contribuer à relever ce défi par quelques réflexions qu’il sera sans doute nécessaire d’approfondir et de compléter dans un grand débat avec nos partenaires “nationaux-républicains”.
Bref état des lieux
L’idée qu’une nouvelle ligne de partage idéologique se substitue à
la fracture “droite-gauche” fait aujourd’hui son chemin dans tous les
esprits. Le premier camp, celui des “européistes” ou “démocrates” ou
encore “modernes”, proclame le primat de l’économie (libérale) et de la
morale (des Droits de l’Homme) sur le politique et la souveraineté des
États, ces deux derniers principes étant défendus par le second camp,
celui des “souverainistes” ou “républicains” ou encore “classiques”. On a
vu la pertinence de ce nouveau clivage lors des débats sur Maëstricht
et Amsterdam ou, plus récemment, pendant la crise du Kosovo. Concernant
la question qui nous intéresse ici, les divergences entre démocrates et
républicains sont encore une fois très tranchées, les premiers se
réclamant du girondisme au nom de la Société, les seconds du jacobinisme
au nom de l’État. Disons-le dès maintenant, ce manichéisme ne satisfait
pas les maurrassiens et nous ne croyons pas que l’on puisse opposer
avec profit la société à l’État, les régions à la nation.
Notre fédéralisme
La logique qui a inspiré le fédéralisme maurrassien, –
“fédéralisme” ne signifiait pas alors “fédéralisme européen” mais
décentralisation à l’intérieur de la Nation – était avant tout tournée
contre l’individualisme démocratique et contre la transformation de
l’État régalien en État-administrations. Ainsi s’imposaient, d’une part,
l’enracinement comme réponse à l’affaiblissement des sentiments
d’appartenance collective, et d’autre part, la réforme régalienne de
l’État, dont la fonction n’est pas essentiellement sociale mais
politique. Pour Maurras, « doctrinaire d’un nationalisme dont Barrès fut le poète »
(1), comme l’a écrit Jean-Pierre Chevènement, la fonction de la
décentralisation est donc de renforcer la nation et d’affermir l’État, à
l’opposé de tous les autonomismes et autres indépendantismes auxquels
le mouvement mistralien, dont se réclamait le maître de l’Action
française, était absolument étranger.
Leurs fédéralismes
Une des causes du malentendu actuel sur le terme “fédéralisme”
vient de l’offensive du gauchisme pour récupérer le sentiment
régionaliste dans les années soixante, manœuvre qui a parfaitement
fonctionné dans le cas de l’occitanisme et du mouvement breton. Ce
nouveau régionalisme s’est pensé contre l’État et la nation, provoquant
un premier mouvement de crispation jacobine chez les patriotes de gauche
comme de droite. L’actuel “fédéralisme” européen qui s’appuie sur le
modèle allemand des Länders pour saper les fondements de l’État-nation à
la française est venu renforcer cette réaction “étatiste” des
chevènementistes ou des gaullistes. Ces derniers ont d’ailleurs vite
oublié que le général De Gaulle, loin d’être hostile par principe à la
décentralisation, avait proposé celle-ci aux Français en 1969.
En guise de conclusion
Quelques certitudes tout d’abord : le fédéralisme maurrassien
n’est pensable que dans le cadre national, il se propose d’élaguer
l’État des tâches superflues qui l’encombrent pour le rendre plus
efficace, il s’oppose avec force à tous les séparatismes et, surtout, on
ne peut lui faire justice si on le détache de l’impératif royal si
important pour Maurras. En effet, la société peut s’organiser sur un
mode fédéral à condition qu’il existe un fédérateur assez fort
(symboliquement parlant) pour en incarner l’unité.
Quelques pistes de réflexion pour terminer : et si le fédéralisme maurrassien était la réponse aux craintes des nouveaux jacobins de voir l’État se réduire à la gestion comptable de l’économie ? Et si l’enracinement était la seule réponse à la vision du monde (libérale, cosmopolite, consumériste) des tenants de l’euroland et du mondialisme ? Voilà, semble-t-il deux questions que nous devons inlassablement poser à nos alliés politiques du moment.
Quelques pistes de réflexion pour terminer : et si le fédéralisme maurrassien était la réponse aux craintes des nouveaux jacobins de voir l’État se réduire à la gestion comptable de l’économie ? Et si l’enracinement était la seule réponse à la vision du monde (libérale, cosmopolite, consumériste) des tenants de l’euroland et du mondialisme ? Voilà, semble-t-il deux questions que nous devons inlassablement poser à nos alliés politiques du moment.
Stéphane BLANCHONNET
(1) Mettons de côté la nuance légèrement péjorative du terme
“doctrinaire” pour comprendre que le président du Mouvement des Citoyens
exprimait là, avec justesse, que Maurras sut transformer en programme
politique les idées que contenaient le roman Les Déracinés de Maurice Barrès.
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