Ce matin [lundi 21 janvier 2013] en revenant de l’émouvante messe de Réquiem pour Louis XVI et la Famille Royale de France, notre amaryllis, pourtant endormie, s’était réveillée pour nous offrir deux fleurs pourpres comme le sang versé du Roi et de la Reine et un bouton tendre et vert, le petit Roi emmuré et mort dans ses déjections dans la prison du Temple.
Les terroristes de 1793 ont tué le père, ils ont tué la mère et laissé mourir l’enfant roi. Nombreux sont les Français qui se sentent désormais orphelins. A l’image de cette amaryllis, les lys de France refleuriront peut-être, mais nul ne sait l’heure ou le jour...
Aux difficultés, aux incertitudes et aux misères engendrées par des crises depuis plus de trente ans, s’ajoute une angoisse ontologique. Qui sommes nous, quel serait notre place dans le chaos actuel ? Notre visage ne s’imprime même plus sur le miroir de l’Histoire et ceux qui nous ont précédé sont déjà gommés de la mémoire, oubliés. Le non enseignement des fondamentaux de notre Histoire ne sont pas seuls en cause.
Après l’illusion brisée d’une croissance matérielle infinie, après l’exaltante découverte d’une liberté qui paraissait aux Français sans limite, voici les Français seuls face à eux même , à leur image virtuelle rendue par le Grand Ordinateur. Chacun édicte alors sa loi, ses propres règles de conduite, tout en vivant depuis l’enfance une compétition de tous les instants dans laquelle seuls les plus forts et les plus riches ont des chances de survie. Ni la science, ni la raison, ni les idéologies politiques, ni le simple bon sens ne peuvent apporter les réponses attendues et les apaisements souhaités, une main tendue, un bras pour consoler, une épaule où reposer sa tête.
C’est ainsi que revient le temps des peurs collectives, peur de l’autre, peur de l’épidémie, peur de demain auxquelles on tente d’échapper en se réfugiant dans des sectes de pacotille et manipulatrices, en se donnant une identité mythique ou en projetant sur n’importe quel bouc émissaire la violence dont on est victime. Nous nous trouvons alors désemparés.
De ce mouvement de retour de boomerang la France a fait maintes fois l’expérience depuis deux cent vingt ans. Cherchant une transcendance vers le haut, nous avons fabriqué de redoutables idoles. Cherchant l’autorité nous pourrions sombrer dans la dictature sinon dans la Terreur ! Niant toute hiérarchie nous avons vu s’imposer de sombres caricatures. A la poursuite de la tradition nous avons été abusés par des prétentions et des apparences. La France continue d’être déchirée par ces mouvements désaxés et par ces dérives déboussolées. Plutôt que de s’abandonner à des extrêmes, de l’uniformité au culte exacerbé de la différence, du mondialisme au repli malthusien sur soi, du modernisme échevelé au traditionalisme le plus étroit, il faudrait trouver un lieu de rencontre et d’harmonisation, un point d’équilibre entre des exigences contradictoires.
La tradition royale dont j’ai hérité n’est pas une idéologie ni un dogme préfabriqué. C’est une lente et patiente action qui a su forger en plus de mille ans l’identité de la France et celle des peuples de France, comme on disait si joliment au XVIII° siècle. En effet la royauté capétienne a su tisser l’unité sur la trame de la diversité. Elle a su symboliser l’unité commune tout en permettant l’intégration de tous. Elle a développé le sentiment d’appartenance à la terre tout en demeurant ouverte sur le monde et en maintenant vivant le lien avec la tradition et les valeurs qui la cimentent. Elle a permis ainsi que s’accomplissent les évolutions nécessaires.
Il ne suffit pas, par ailleurs, d’affirmer l’immortalité de quelques grands principes pour assurer à l’Etat la continuité de son action. Pour que les droits et les devoirs de l’homme existent il faut un garant qui ne soit pas partie prenante aux forces politiques et sociales toujours prêtes a redéfinir les règles avec les intérêts sectoriels du moment ou du plus fort...
Pour que l’unité soit maintenue, il faut dans notre pays une harmonie dans laquelle chaque citoyen, de droite comme de gauche, pauvre ou riche, du nord comme du sud, puisse se trouver représenté et puisse s’identifier dans une personne ayant capacité à défendre sa terre et son âme. Pour qu’il y ait continuité il faut pour l’exprimer et l’incarner un homme -soutenu par sa reine- placé au coeur des rouages et au delà des affrontements afin, justement, que les règles de bon sens soient pleinement comprises et respectées. La médiation et l’arbitrage assurés par un pouvoir indépendant et pérenne est nécessaire à toute vie sociale. S’il est nécessaire de tenir compte de tous les paramètres économiques, financiers, culturels et humains du moment, ceux-ci ne suffisent pas à donner une image complète donc réelle de la France ni de son identité profonde. Nous aimerions pouvoir retrouver la dimension qui permette à l’Homme, à chaque Français de se révéler à lui-même dans son propre accomplissement, dans sa plénitude et dans sa dignité.
Si les signes distinctifs extérieurs d’un être -tout comme ceux d’un pays se modifient et évoluent au cours des âges, en revanche le noyau intérieur fondamental, l’âme, demeure toujours la même en dépit des strates qui peuvent la recouvrir et même l’occulter. Le rôle essentiel d’un roi est de permettre à chacun de trouver sa propre clef pour donner un sens à sa vie et retrouver ses racines. "Les rois sont une nécessité biologique, disait Lawrence Durell, peut-être sont -ils le reflet de la constitution même de l’âme".
HENRI COMTE DE PARIS DUC DE FRANCE - IMRF
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