Où va la république ? A vrai dire, ce serait le cadet de nos soucis si ce régime désespérant n’entraînait la France avec lui dans une lente dérive qui semble promettre à notre pays des lendemains catastrophiques.
Car il y a malheureusement fort peu de raisons d’espérer pour tout citoyen qui regarde la situation sans préjugé aucun. Alourdie par son déficit qui se creuse chaque jour davantage, la situation financière du pays est gérée au jour le jour, dans le cadre contraint d’une Union européenne qui interdit toute marge de manœuvre et, non contente d’alourdir nos exportations par la monnaie la plus forte du monde, est le seul espace commercial entièrement ouvert à une concurrence internationale aussi furibonde que déloyale. Or, nos politiques, de gauche et de droite, font consensus sur le respect scrupuleux des « engagements européens de la France », qui ne sont que ceux d’une oligarchie qui a vampirisé l’Etat et s’arrange avec ces fameux principes républicains dont nos politiciens se gargarisent à longueur de journée pour mieux les vider de toute substance. Qu’en est-il de ce fameux pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple, qui définirait notre république démocratique ? Le non du peuple à Maëstricht ? Violé ! La voix du peuple contre le mariage homosexuel dans la plus grande manifestation de l’histoire de France ? Ignorée ! Cette même voix s’exprimant dans la plus grande pétition publique réunie dans un délai historiquement court ? Méprisée !
Certes, nous ne sommes pas de ceux qui pensent qu’un référendum, une pétition ou une manifestation, même « historiques », soient par eux-mêmes sources de légitimité quand ce sont les fondements de la nation qui sont en jeu, qu’il s’agisse de l’indépendance de la patrie ou de ce socle de la société qu’est la famille. Non, il est des principes qui dépassent la volonté populaire, ou plus exactement, qui ne sont pas mesurables à l’aune de ce monstre qu’est l’opinion publique. Mais justement : le 31 mai 2005 ou les 13 janvier et 24 mars 2013, ce n’est pas l’opinion publique, fabrication des media, qui s’est exprimée, mais ce bon sens du pays réel, ce sûr instinct de conservation, cette volonté vraiment populaire de persévérer dans l’être. Aussi, comment ne pas observer qu’en république, les dés sont pipés et que « volonté générale », « expression démocratique », « pouvoir du peuple » ne sont que des mots, vidés de leur sens par une pratique politique inhérente au régime lui-même. Si la république est bien, en France, le régime de l’imposture, c’est qu’elle est fondée sur trois mensonges originels : historique — le peuple brisant ses chaînes —, idéologique — le peuple se libérant de l’obscurantisme —, politique — le peuple devenant maître de son destin. Jamais les Français n’ont été autant asservis que depuis cette froide journée de janvier 1793 où on leur a fait croire qu’en coupant la tête de leur souverain ils devenaient souverains eux-mêmes. Le premier qui, ayant inventé la volonté générale, s’avisa de dire : « Vous êtes les maîtres absolus » et trouva des compatriotes assez simples pour le croire et échanger leurs libertés concrètes contre cette souveraineté illusoire, fut le vrai fondateur de la démocratie. Plus de deux siècles ont passé. Et si la France a paru parfois se relever et rompre avec la fatalité issue de la révolution, malheureusement, la pesanteur historique a à chaque fois triomphé. Oui, ces deux siècles sont ceux d’un effacement progressif de notre pays, comme d’une disparition programmée. Et qui semble connaître aujourd’hui une accélération fulgurante. Le mandat de François Hollande — car François Hollande n’existe pas, il n’est que le syndic de faillite —, préparé par celui d’un Nicolas Sarkozy dont seuls les Français qui ont la mémoire courte peuvent oublier qu’il fut une insulte permanente à l’être de notre pays, paraît achever comme un long déclin.
On nous dira qu’en cela la France partage, sur les plans économique, social, national et « sociétal » le sort d’une grande partie de l’Europe. Nous ne le nions pas. Mais avec cette particularité : ayant abandonné depuis deux siècles, comme une vulgaire défroque, sa dignité de fille aînée de l’Eglise et de nation des lys, rempart contre l’Empire, pour la parure de messagère de la liberté et de patrie des droits de l’homme, la France cultive ses divisions au nom de principes quasi-religieux qui la conduisent à sa perte, s’autodénigrant à mesure qu’elle leur aurait été infidèle. Car chez nous, le mots d’égalité, de fraternité et de liberté ne se contentent pas de composer une devise inscrite au fronton des prisons. Ce sont des valeurs que la droite et la gauche prennent au sérieux, la gauche avec plus de ferveur, la droite plus de veulerie, mais c’est le grand héritage commun : celui qui, jadis, justifiait le colonialisme et justifie aujourd’hui l’immigration ; qui, jadis, justifiait la lutte contre l’obscurantisme chrétien et prépare aujourd’hui la destruction de la famille ; qui, jadis, éradiquait les cultures et les libertés des peuples de France fédérés par le roi et impose aujourd’hui un multiculturalisme et un communautarisme planétaires.
La république n’est pas simplement la femme sans tête, c’est-à-dire un régime dont l’incapacité politique a conduit plusieurs fois la France au bord de l’abîme — 1815, 1870, la saignée de 14-18 conduisant à la fausse paix de 1919, la vraie défaite de 1940, dont nous ne sommes toujours pas relevés... Non, la république, c’est plus que cela : c’est la justification même de notre perte. Ayant abandonné un patriotisme aussi abstrait que moral, destiné, en tant que tel, à se vider de toute signification au fur et à mesure qu’il était démenti par l’histoire, la république a trouvé depuis trente ans dans l’universalisme mercantile une valeur de remplacement qu’elle veut imposer à la fois par la désintégration du peuple lui-même (c’est le rôle de l’immigration) — un peuple qu’elle a déjà culturellement désincarné par son individualisme idéologique —, et le renversement de la société (ce sont les lois sociétales). C’est le même constructivisme qui est à l’œuvre depuis deux siècles et que les Lumières ont essaimé tel un virus dans le monde dit occidental. C’est ce même constructivisme qui aboutit à la destruction sociale, nationale, culturelle et ethnique de notre peuple. Que cette république risque bientôt de mourir des contradictions inhérentes à ces bouleversements, contradictions que révèlent le récurrent débat sur la sacro-sainte laïcité, nous importe dans la mesure où c’est l’existence même de notre nation qui est en jeu.
La crise à venir n’est pas simplement politique. C’est pourquoi espérer un nouveau 6 février 34, un 6 février qui, lui, réussirait, est insuffisant. C’est à autre chose que nous devons nous préparer. A une lutte sans merci car c’est notre être même qui en dépendra. Le 24 mars 2013, un million et demi de Français sont venus crier qu’ils ne voulaient pas mourir. Rien n’est perdu tant que le pays réel sait encore faire entendre sa voix. Mais le temps presse. Et les princes devront, cette fois, être au rendez-vous.
François Marcilhac - L’AF 2860
PS : L’éditorial fut écrit avant que l’affaire Cahuzac n’éclate. Mais ceux qui auront compris ces lignes auront également compris qu’au fond, cette affaire est un non-énévement.
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